Lutte contre le syndrome de l’impuissance acquise : votre première priorité pour redonner de l’énergie à votre équipe !

« Franchement, ça ne sert à rien » , « De toute façon, on a déjà essayé », « C’est toujours la même chose »… le genre de petites phrases qui ruinent une équipe et, par voie de conséquence, un projet entier. Vous devez redresser un projet en pleine dérive ? Commencez par vérifier que votre équipe n’est pas paralysée par l’idée qu’elle ne pourra rien changer à la situation qu’elle subit. Traiter ces blocages deviendra même probablement votre première priorité…

Une vie de chien !

Dans les années 1960, Martin Seligman, alors jeune chercheur en psychologie, a fait une découverte fortuite qui allait révolutionner notre compréhension du comportement humain et qui constitue encore une référence pour comprendre les ressorts de la démotivation dans une organisation (lien vers l’article en ligne).

Lors d’une expérience impliquant des chiens soumis à des chocs électriques inévitables, Seligman observa un phénomène surprenant : après avoir été exposés à ces conditions, certains animaux cessaient complètement d’essayer d’échapper à la douleur, même lorsqu’une issue leur était offerte. Cette observation cruciale conduisit Seligman à formuler le concept d’impuissance acquise, remettant en question les paradigmes dominants du behaviorisme de l’époque. Cette découverte ouvrit la voie à de nouvelles perspectives en psychologie, notamment dans l’étude de la dépression et de la motivation, et jeta les bases de ce qui deviendrait plus tard la psychologie positive.

Mais ce qui est valable pour un chien peut-il être transposé à l’homme ?

Plusieurs études menées après les travaux initiaux de Martin Seligman sur les animaux ont démontré que le phénomène de l’impuissance acquise s’appliquait également aux êtres humains. Les chercheurs ont cherché à reproduire des conditions similaires en laboratoire, en utilisant des stimuli aversifs non contrôlables, pour observer les réactions humaines.

L’une des études clés prolongeant les travaux de Seligman chez l’homme est celle menée par Hiroto et Seligman en 1975.

Dans cette expérience, les participants étaient exposés à un bruit fort et désagréable. Un groupe pouvait arrêter le bruit en appuyant sur un bouton, tandis qu’un autre groupe n’avait aucun contrôle sur l’arrêt du bruit, quelle que soit son action. Par la suite, les deux groupes étaient placés dans une nouvelle situation où il était possible d’échapper au bruit (par exemple, en déplaçant la main d’un côté à l’autre d’une boîte). Les résultats ont montré que les participants qui n’avaient eu aucun contrôle sur le bruit dans la première phase étaient moins susceptibles de faire des efforts pour échapper au bruit dans la seconde phase, même si l’évasion était désormais possible. Ils manifestaient les caractéristiques de l’impuissance acquise, ayant appris que leurs actions n’avaient pas d’incidence sur l’événement aversif.

L’impuissance acquise peut aussi atteindre les groupes d’individus

Après les travaux originaux de Seligman ou l’étude de Hiroto et Seligman sur les individus, plusieurs axes de recherche et observations en milieu professionnel ont contribué à solidifier l’idée que l’impuissance acquise (ou aussi : impuissance apprise) est un phénomène pertinent pour les groupes d’individus :

  1. Les études sur le « silence acquiescent » en organisation : Certaines recherches se sont intéressées au phénomène où les employés choisissent de ne pas exprimer leurs opinions, leurs préoccupations ou leurs idées, même lorsqu’ils en ont, par conviction que cela ne changera rien ou aura des conséquences négatives. Ce « silence acquiescent » est fortement lié à l’impuissance acquise, suggérant que les individus (et par extension, les équipes) apprennent que leur « voix » n’a pas d’impact sur les décisions ou les situations. Des études dans ce domaine analysent les cultures organisationnelles, les styles de leadership et les expériences passées qui contribuent à ce sentiment de futilité.
  2. Recherches sur l’impact du leadership et de la culture organisationnelle : De nombreuses études examinent comment un management inefficace, autoritaire ou un manque de soutien peut créer un environnement où les équipes ressentent un manque de contrôle. Une culture d’entreprise qui punit l’échec, décourage la prise de risque ou ne valorise pas l’autonomie peut renforcer l’impuissance apprise au niveau collectif. Ces études, souvent basées sur des enquêtes et des études de cas, montrent les corrélations entre ces facteurs et des indicateurs de performance d’équipe et de bien-être.
  3. Analyse de l’impact des changements organisationnels répétés et mal gérés : Les équipes qui subissent des réorganisations fréquentes, des changements de direction, ou des modifications de projet sans explication claire ni implication peuvent développer un sentiment que leur environnement est chaotique et incontrôlable. Des études qualitatives et quantitatives ont exploré comment ces expériences peuvent entraîner une démobilisation et une forme d’impuissance collective face à l’instabilité.
  4. Études sur la dynamique des équipes confrontées à des obstacles systémiques : Dans certains secteurs ou organisations, les équipes peuvent être confrontées à des bureaucraties lourdes, à des processus inefficaces ou à un manque chronique de ressources qui limitent structurellement leur capacité à réussir. La recherche dans ce domaine documente comment ces contraintes systémiques peuvent générer un sentiment d’impuissance collective et affecter la résilience de l’équipe.

L’ensemble de ces recherches en psychologie du travail et des organisations apporte des données substantielles appuyant le fait que le phénomène de l’impuissance acquise est une dynamique bien réelle au sein des groupes professionnels et qu’il a des conséquences significatives sur leur fonctionnement et leur efficacité. Elles soulignent l’importance de s’intéresser aux facteurs contextuels et relationnels qui peuvent soit prévenir, soit exacerber ce sentiment d’impuissance collective.

Cette dynamique psychologique se traduit par des impacts tangibles sur la performance collective : démotivation généraliséechute de productivité et augmentation de l’absentéisme.

Pour aller plus loin : la théorie de l’attribution

La théorie de l’attribution joue un rôle central dans la compréhension du phénomène de l’impuissance acquise, en particulier dans le cadre de la théorie révisée de l’impuissance acquise proposée par Abramson, Seligman et Teasdale (1978). Cette théorie postule que ce n’est pas seulement l’expérience de l’incontrôlabilité qui mène à l’impuissance, mais la façon dont les individus expliquent (attribuent) les causes de ces événements incontrôlables.

Selon cette perspective attributionnelle, les individus analysent les causes des événements, en particulier les événements négatifs ou les échecs, selon trois dimensions principales :

  1. Locus de causalité (Interne vs Externe) :
    • Interne : La cause est attribuée à soi-même (par exemple, « J’ai échoué parce que je ne suis pas assez intelligent »).
    • Externe : La cause est attribuée à des facteurs extérieurs (par exemple, « J’ai échoué parce que l’examen était trop difficile » ou « parce que j’ai manqué de chance »).
  2. Stabilité (Stable vs Instable) :
    • Stable : La cause est perçue comme permanente et immuable dans le temps (par exemple, « Je ne suis pas intelligent » – trait de personnalité perçu comme stable).
    • Instable : La cause est perçue comme temporaire et susceptible de changer (par exemple, « Je n’ai pas assez étudié cette fois » – effort, qui peut varier).
  3. Globalité (Global vs Spécifique) :
    • Global : La cause est perçue comme influençant de nombreux domaines de la vie (par exemple, « Je ne suis bon en rien »).
    • Spécifique : La cause est perçue comme limitée à une situation ou un domaine particulier (par exemple, « Je ne suis pas bon en mathématiques, mais je suis bon en histoire »).

Le rôle crucial de la théorie de l’attribution dans l’impuissance acquise réside dans le fait que certains individus ont un style attributionnel pessimiste (tendance naturelle à attribuer les évènements négatifs à des causes internes, stables et globales) et sont donc particulièrement vulnérables au développement de l’impuissance acquise et de ses symptômes, comme la dépression.

À l’inverse, une personne ayant un style attributionnel optimiste aura tendance à attribuer les événements négatifs à des causes externes, instables et spécifiques (« L’échec était dû à des circonstances extérieures, c’était juste pour cette fois, et cela ne remet pas en question mes compétences générales »). Ce type d’attribution protège contre l’impuissance acquise, car il maintient le sentiment que l’on a un certain contrôle sur sa vie ou que, même face à un revers, la situation peut s’améliorer à l’avenir et ne remet pas en cause la valeur globale de l’individu.

Comprendre le style attributionnel d’un individu ou d’une équipe est donc essentiel pour diagnostiquer et traiter l’impuissance acquise.

Travailler sur le style attributionnel pour le rendre plus optimiste est d’ailleurs une composante clé des interventions visant à surmonter l’impuissance apprise.

Démotivés ! Apprendre à détecter l’impuissance acquise dans une organisation

Voici un petit florilège des signes manifestes qui peuvent indiquer la présence de ce syndrome dans une équipe.

Au niveau individuel :

  1. Baisse de motivation et d’engagement : Les employés semblent désintéressés par leur travail, font le minimum d’efforts, et montrent un manque d’enthousiasme pour les nouvelles tâches ou projets.
  2. Passivité et manque d’initiative : Ils attendent constamment les instructions, hésitent à prendre des décisions, et ne proposent pas de solutions aux problèmes, même lorsqu’ils sont directement concernés.
  3. Procrastination et évitement : Ils remettent à plus tard les tâches difficiles ou complexes, ou cherchent à les éviter complètement.
  4. Expression de fatalisme et de désespoir : Tenir des propos résignés du type « Cela ne marchera jamais », « On a déjà essayé », « Ça ne sert à rien de faire des efforts, rien ne changera », ou exprimer un sentiment d’être bloqué.
  5. Faible estime de soi professionnelle : Douter de ses compétences, se dévaloriser, et attribuer systématiquement les échecs à ses propres lacunes plutôt qu’à des facteurs externes ou temporaires.
  6. Difficulté à résoudre les problèmes : Face à un obstacle, l’employé se décourage rapidement et ne cherche pas activement des moyens de le surmonter.
  7. Cynisme et attitude négative : Manifester un scepticisme généralisé à l’égard des initiatives de l’entreprise, des changements, ou des discours positifs.
  8. Augmentation de l’absentéisme ou du présentéisme : S’absenter plus fréquemment ou être physiquement présent mais mentalement déconnecté du travail.

Au niveau de l’équipe ou de l’organisation :

  1. Manque de proactivité collective : L’équipe dans son ensemble ne prend pas l’initiative d’améliorer les processus, de signaler les problèmes de manière constructive, ou de proposer de nouvelles idées.
  2. Réaction apathique face aux défis : Face à un revers ou une difficulté majeure, l’équipe semble résignée plutôt que de chercher collectivement des solutions.
  3. Communication passive ou évitante : Les discussions d’équipe peuvent être superficielles, les sujets difficiles sont évités, et les membres peuvent hésiter à exprimer des désaccords ou des préoccupations.
  4. Culture du « on a toujours fait comme ça » : Une résistance marquée au changement et une tendance à s’accrocher aux méthodes existantes, même si elles sont inefficaces, par manque de croyance en la possibilité d’améliorer les choses.
  5. Attribution externe et stable des échecs : L’équipe a tendance à blâmer systématiquement des facteurs externes permanents (la direction, le marché, les autres départements) pour ses difficultés, sans reconnaître sa propre marge de manœuvre.
  6. Baisse de la collaboration et du soutien mutuel : Les membres de l’équipe peuvent se replier sur eux-mêmes et être moins enclins à aider leurs collègues, estimant que les efforts collectifs sont vains.
  7. Perte de la vision et de l’enthousiasme collectif : L’équipe ne semble plus croire en l’importance de sa mission ou en la possibilité d’atteindre des succès significatifs.
  8. Augmentation du roulement du personnel (turnover) : Un nombre croissant d’employés quittent l’organisation, en particulier ceux qui pourraient être les plus proactifs, cherchant un environnement où ils sentent qu’ils peuvent avoir un impact.

Bien entendu, la présence isolée de l’un de ces signes ne suffit pas nécessairement à diagnostiquer l’impuissance acquise. Sinon, il y a fort à parier que ce diagnostic pourrait être fait dans chaque équipe ! En revanche, l’observation d’une constellation de ces comportements, persistante dans le temps et touchant une partie significative des employés ou des équipes, doit alerter le management sur la potentielle présence de ce syndrome.

Identifier ces signes est la première étape cruciale pour pouvoir ensuite mettre en place des actions visant à redonner du pouvoir d’agir et – donc – de la motivation aux équipes.

Lutter contre l’installation de l’impuissance acquise : votre priorité de manager !

En tant que manager, la première des premières priorités est de tout faire pour ne jamais laisser s’installer le syndrome de l’impuissance acquise dans nos équipes ! Notre rôle est crucial en matière de prévention !

Pour cela, il est important de bien comprendre quels sont les comportements qui favorisent l’installation de ce phénomène. Soyons clair : l’effet nocif de ces comportements semble évident. Pourtant, force est de constater qu’on les retrouve régulièrement, tout particulièrement dans des contextes de crise où le management va avoir tendance à retrouver des réflexes Command & Control propres à créer un cercle vicieux qui aboutit aux effets de l’impuissance acquise.

Là encore, un petit florilège des pratiques managériales qui favorisent l’émergence de l’effet d’impuissance acquise dans les équipes :

  1. Le micromanagement excessif : Un manager qui contrôle chaque détail du travail, dicte précisément comment les tâches doivent être effectuées, et ne laisse aucune autonomie à l’équipe signale un manque de confiance. À long terme, cela étouffe l’initiative et conduit les employés à croire que leurs propres jugements ou méthodes ne sont pas valables, renforçant l’idée qu’il est inutile d’essayer d’innover ou de prendre des décisions.
  2. Le manque de clarté et de feedback : Ne pas fournir d’objectifs clairs, des attentes floues ou un feedback insuffisant et incohérent peut rendre difficile pour l’équipe de comprendre si ses efforts sont bien dirigés ou efficaces. L’absence de retours, positifs ou constructifs, donne l’impression que le travail de l’équipe n’est pas important ou n’est pas remarqué, ce qui peut mener à la démotivation.
  3. La critique excessive et non constructive : Se focaliser uniquement sur les erreurs et les échecs sans reconnaître les efforts ou les succès, ou formuler des critiques de manière agressive ou humiliante, peut éroder la confiance en soi des membres de l’équipe et les rendre craintifs à l’idée de prendre des risques ou d’essayer de nouvelles choses.
  4. L’imprévisibilité et l’incohérence : Changer constamment d’avis, modifier les priorités sans explication, ou appliquer des règles de manière inégale crée un environnement instable et imprévisible. L’équipe apprend que les résultats ne dépendent pas de ses efforts ou de sa planification, mais de l’humeur ou des décisions arbitraires du manager.
  5. Le manque de soutien et de ressources : Ne pas fournir à l’équipe les outils, les informations, la formation ou le soutien managérial dont elle a besoin pour accomplir ses tâches peut la placer dans des situations d’échec inévitable. Face à des obstacles insurmontables par manque de ressources, l’équipe peut développer un sentiment d’impuissance.
  6. L’ignorance des suggestions et des préoccupations : Lorsque les managers ne tiennent pas compte des idées, des suggestions ou des préoccupations soulevées par les membres de l’équipe, cela envoie le message que leur avis n’a pas de valeur et qu’ils n’ont aucune influence sur leur environnement de travail. Cela peut mener au « silence acquiescent » et à la résignation.
  7. L’attribution des échecs à l’équipe seule : Si, en cas de problème ou d’échec, le manager blâme systématiquement l’équipe sans prendre en compte les facteurs externes, les contraintes ou ses propres décisions, cela renforce chez l’équipe l’idée que les problèmes sont de leur seule responsabilité et qu’ils sont intrinsèquement incompétents (attribution interne et globale).
  8. La promotion de la compétition interne excessive : Encourager une compétition malsaine entre les membres de l’équipe plutôt que la collaboration peut créer un environnement de méfiance où l’entraide diminue. Si les succès sont perçus comme étant uniquement le résultat d’efforts individuels dans une lutte pour la reconnaissance, cela peut amoindrir le sentiment d’efficacité collective.
  9. La rétention d’information : Le fait de ne pas partager les informations pertinentes sur l’entreprise, les projets, ou les raisons derrière certaines décisions peut donner à l’équipe le sentiment d’être tenue à l’écart et de ne pas comprendre le contexte de son travail, réduisant ainsi leur capacité à agir de manière éclairée et proactive.

Ces pratiques managériales, lorsqu’elles sont répétées et constituent la norme, peuvent sérieusement miner la motivation, la confiance et la proactivité d’une équipe, la conduisant progressivement vers un état d’impuissance acquise où ses membres cessent de croire en leur capacité à influencer positivement leur travail et leurs résultats.

Un management basé sur la confiance, la clarté, le soutien et l’autonomie est essentiel pour prévenir ce syndrome dévastateur.

Quand tout va mal : (re)mobiliser une équipe démotivée et bloquée

Vous pouvez néanmoins vous retrouver dans une situation de pilotage d’une équipe qui donne tous les signes d’une équipe bloquée par l’impuissance acquise. Il s’agit alors de mettre en oeuvre des leviers pour la remobiliser et lui donner la confiance nécessaire pour prendre des initiatives et avancer.

La recherche montre que la remobilisation d’une équipe touchée par l’impuissance acquise nécessite une approche structurée et progressive.

L’objectif principal est de briser le cycle de la passivité et de redonner aux membres de l’équipe le sentiment qu’ils ont un impact et un contrôle sur leur travail.

Je vous propose de vous concentrer sur 3 axes majeurs dans votre action :

  • Axe n°1 : Reconstruction de la confiance
  • Axe n°2 : Adopter un style attributionnel optimiste
  • Axe n°3 : Insuffler un esprit d’équipe fort

Axe n°1 : Reconstruction de la confiance

Notre expérience démontre que la reconstruction de la confiance commence par l’établissement d’un environnement de sécurité psychologique.

Pour cela, vous avez à votre disposition des leviers « simples » qui sont pourtant d’une efficacité redoutable. Commencez par :

  • Être un manager « fiable »
    • Tenir ses promesses : Respecter les engagements pris envers l’équipe, qu’il s’agisse de fournir des ressources, de défendre leurs intérêts, ou de mettre en œuvre des décisions. L’incohérence managériale est une source majeure de perte de confiance.
    • Établir des attentes claires et stables : Communiquer de manière transparente sur les objectifs, les priorités et les processus. Éviter les changements de cap constants qui donnent l’impression que rien n’est certain.
    • Être prévisible et juste : Traiter tous les membres de l’équipe avec équité et prendre des décisions basées sur des critères objectifs et transparents.
  • Favoriser la sécurité psychologique :
    • Encourager l’expression sans crainte : Créer un environnement où les membres de l’équipe se sentent libres de s’exprimer, de poser des questions, de signaler des problèmes et de proposer des idées sans craindre d’être jugés, critiqués négativement ou sanctionnés. Le manager doit montrer l’exemple en étant ouvert aux retours.
    • Considérer l’échec comme une opportunité d’apprentissage : Dédramatiser l’erreur et l’échec. Encourager l’équipe à analyser collectivement ce qui n’a pas fonctionné pour en tirer des leçons, plutôt que de rechercher des coupables.
  • Améliorer la communication et la transparence :
    • Partager l’information : Tenir l’équipe informée des décisions importantes, des raisons qui les sous-tendent, et du contexte global de l’entreprise. La rétention d’information nourrit la méfiance.
    • Être accessible et à l’écoute : Se rendre disponible pour répondre aux questions, écouter les préoccupations et prendre au sérieux les feedbacks de l’équipe.

Axe n°2 : Adopter un style attributionnel optimiste

Nous l’avons vu au début de cet article, il existe un lien fort entre la théorie de l’attribution et le développement de l’impuissance acquise. Le rôle du manager est donc de favoriser un style attributionnel optimiste propre à lutter intrinsèquement contre l’impuissance acquise.

Il dispose pour cela de leviers tels que :

  • Modéliser un style attributionnel optimiste : Le manager doit montrer l’exemple en expliquant les succès et les échecs de l’équipe de manière constructive, en se concentrant sur les facteurs sur lesquels l’équipe a ou peut avoir une influence (effort, stratégie, apprentissage) plutôt que sur des causes externes immuables ou des lacunes intrinsèques.
  • Faciliter les analyses post-projet ou post-échec : Après un projet (réussi ou non) ou face à une difficulté, organiser des réunions pour analyser collectivement ce qui s’est passé. Guider la discussion pour identifier les causes de manière objective, en distinguant ce qui était sous le contrôle de l’équipe de ce qui ne l’était pas, et en se concentrant sur les apprentissages pour l’avenir.
  • Encourager la responsabilité mais pas le blâme : Inciter les membres de l’équipe à reconnaître leur rôle dans les événements (responsabilité interne), mais sans tomber dans le blâme qui renforce l’attribution interne négative. L’accent doit être mis sur « Qu’avons-nous appris et comment pouvons-nous faire différemment ? » plutôt que « Qui est responsable de cet échec ? ».
  • Célébrer les efforts et les processus autant que les résultats : Valoriser le travail bien fait, la persévérance, la collaboration, l’apprentissage, même si le résultat final n’est pas parfait. Cela renforce l’idée que l’effort et les bonnes pratiques ont de la valeur, indépendamment des succès externes parfois influencés par des facteurs incontrôlables.
  • Développer une culture du feedback constructif : Encourager les membres de l’équipe à se donner mutuellement du feedback basé sur les actions et les comportements (instable et spécifique) plutôt que sur des traits de personnalité (stable et global).

Axe n°3 : Insuffler un esprit d’équipe fort

On l’a vu, la vulnérabilité à l’impuissance acquise est autant individuelle que collective. Je suis néanmoins convaincu qu’un collectif solide permet de dépasser les attributions négatives individuelles et peut ainsi contribuer à créer une dynamique collective dans laquelle chacun va se sentir entraîné.

Il sera alors beaucoup plus simple de lutter contre la perte de motivation individuelle dans un collectif mobilisé.

Créer un esprit d’équipe justifiera un article dédié, mais on peut déjà retenir quelques principes clés :

  • Développer un sentiment d’identité et d’appartenance :
    • Définir une vision et une mission communes : Aider l’équipe à comprendre son rôle, sa raison d’être et la contribution de son travail aux objectifs globaux de l’organisation. Une mission claire donne un sens au travail au-delà des tâches individuelles.
    • Créer un nom, un slogan ou des symboles d’équipe : Des éléments identitaires peuvent renforcer le sentiment d’appartenance et de distinction positive.
    • Favoriser l’inclusion et le respect des différences : S’assurer que chaque membre se sente accepté et valorisé pour sa contribution unique, indépendamment de son parcours ou de ses caractéristiques.
  • Promouvoir la communication ouverte et la transparence :
  • Établir des canaux de communication efficaces : Faciliter le partage d’informations importantes, les mises à jour sur les projets et les discussions ouvertes sur les défis rencontrés.
    • Encourager l’écoute active : S’assurer que chacun se sente entendu et compris. Le manager doit montrer l’exemple.
    • Partager les informations pertinentes : Ne pas retenir les informations cruciales qui pourraient impacter le travail de l’équipe ou sa compréhension du contexte.
  • Renforcer la cohésion et le soutien mutuel :
    • Encourager l’entraide et la collaboration : Mettre en place des dynamiques qui incitent les membres à travailler ensemble, à partager leurs connaissances et à s’aider mutuellement à surmonter les difficultés.
    • Organiser des activités de team-building : Planifier des moments informels (déjeuners d’équipe, sorties, activités ludiques) pour renforcer les liens interpersonnels et permettre aux membres de mieux se connaître en dehors du contexte professionnel strict.
    • Célébrer les succès collectifs : Mettre en avant les réussites de l’équipe dans son ensemble, en soulignant la contribution de chacun au résultat.
  • Gérer les conflits de manière constructive :
    • Ne pas laisser les tensions s’accumuler : Aborder les désaccords et les conflits dès qu’ils apparaissent.
    • Faciliter la résolution des conflits : Aider l’équipe à trouver des solutions ensemble, en se concentrant sur les problèmes plutôt que sur les personnes. Une gestion saine des conflits renforce la confiance et la résilience de l’équipe.
  • Célébrer les efforts collectifs et la résilience :
    • Reconnaître la persévérance face aux obstacles : Souligner la capacité de l’équipe à persévérer et à apprendre des difficultés rencontrées.
    • Mettre en récit les « batailles » gagnées collectivement : Rappeler les moments où l’équipe a surmonté des défis importants grâce à sa collaboration et à sa détermination.

Conclusion : l’impuissance acquise, ce syndrome dévastateur contre lequel on peut lutter efficacement !

La lutte contre l’impuissance acquise représente un défi majeur pour les organisations. Notre expérience montre qu’une approche structurée, combinant détection précoce et actions ciblées, permet de surmonter efficacement ce syndrome.

Nous avons vu que le rôle du manager est déterminant. La création d’un environnement de sécurité psychologique, associée à des pratiques d’attribution optimiste, constituent le socle d’une prévention efficace. Les petites victoires, célébrées régulièrement, agissent comme des catalyseurs puissants pour reconstruire la confiance et la motivation des équipes.

Ma recommandation principale reste la mise en place d’actions immédiates : établir des objectifs atteignables, valoriser les initiatives individuelles, et instaurer une communication transparente et bienveillante.

Mais il est bien évident que vous devez suivre cela dans la durée pour que l’effet soit visible et pérenne. La transformation d’une équipe touchée par l’impuissance acquise demande du temps et de la persévérance, il est pourtant possible d’effectuer une transformation durable et efficiente.

C’est sans doute la plus grande source de satisfaction professionnelle que j’ai pu connaître : voir une équipe se transformer, devenir pro-active et solidaire, et réussir là où tout semblait perdu. Je vous souhaite de connaître à votre tour cette expérience oh combien valorisante !


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